L’Alsace est connue comme étant une région de vins blancs. Nous avons longtemps entendu cet argument lorsque nous évoquions notre seul cépage susceptible de donner des vins rouges : le pinot Noir. Mais, ce temps-là est révolu !

Il est vrai que traditionnellement, le pinot noir avait une couleur entre le rosé profond ou le rouge cerise assez clair. Il se dégustait frais (comme un rosé) et était léger (11 à 12% d’alcool maximum).  

 

Les bourguignons ont très certainement influencé la génération précédente, mais l’évolution de notre société également.

  • Les évolutions techniques ont permis d’avoir des raisins plus mûrs et plus concentrés.
  • Par ailleurs grâce aux évolutions de mentalité, nous avons su mieux maîtriser les rendements et la vinification en rouge.
  • Enfin, le réchauffement climatique a permis de gagner 15 jours de maturité en 15 ans. Cette évolution se traduit par de plus longues cuvaisons au cours desquelles les extractions de couleurs et d’arômes peuvent être plus poussées.

 

Le mois dernier, vous avez pu découvrir la vinification des vins blancs. Mais quelle est la différence avec celle des vins rouges ?

 

Les différentes techniques 

Tout commence par la macération : le pinot noir est un raisin blanc, à pulpe blanche, mais à pellicule coloré. C’est cette pellicule qui contient toute la couleur.
Par exemple, si vous pressiez directement du pinot noir, vous obtiendriez du Blanc de noir (jus blanc issu de raisin noir). Le raisin, une fois vendangé, est donc placé en cuve dite « de macération ». Grâce à cette cuve, la fermentation alcoolique va pouvoir se dérouler.

Le vinificateur a comme objectif ici de mettre en contact le jus avec la pellicule.

Pour ce faire, il peut utiliser divers moyens :

  • Le remontage : qui consiste à extraire le jus de la pellicule du raisin, de manière à colorer le jus.
  • Le pigeage : ici, nous poussons le raisin (appelé chapeau de marc) au contact du jus qui se trouve juste en dessous.
  • Le delestage a pour objectif d’enlever tout le jus de la cuve pour que le chapeau de marc se déstructure et chauffe un peu en fermentant. Le jus est ensuite réincorporé par le dessus. Cela permet de décupler l’efficacité d’un remontage traditionnel.
  • L’infusion est une technique plus rare : il s’agit de pousser le chapeau de marc pour qu’il soit immergé dans le jus.
  • La rotation : une méthode qui consiste à utiliser des cuves de forme horizontale, de manière à pouvoir les tourner afin de mélanger le chapeau de marc et le jus.

Vous remarquerez donc qu’ils existent de multiples techniques pour macérer le raisin dans la cuve et en extraire une couleur adéquate.

Le rôle des tanins

Cependant, chaque méthode a un inconvénient. A la couleur sont associés les tanins, également extraits, qui provoquent une sensation de rusticité et d’astringence en bouche. Tout l’art du métier est donc d’arriver à avoir un bon équilibre entre tanin / astringence et couleur.

Une fois la macération terminée, nous allons séparer les vins qui vont être mis en cuve (appelé vin d’égouttage).

Le raisin, encore présent, va être pressé et donner du vin de presse. Ce vin est plus tannique et plus amer, mais à faible dose, il peut très bien enrichir un vin.

A la différence de la vinification en blanc, la fermentation malolactique va généralement se produire. Il ne s’agit pas directement d’une fermentation mais d’une dégradation d’un acide double en un acide simple. Cette désacidification naturelle va apporter des arômes briochés et beurrés mais surtout arrondir le vin car il sera moins acide. Les tanins seront nettement moins astringents et le vin en sortira donc plus équilibré.

S’en suivra ensuite un élevage plus ou moins long dans différents contenants :

  • Cuve inox : pour garder une fraîcheur et un certain fruité, ce procédé est adapté pour les consommations rapides.
  • Foudre : pour obtenir un vin équilibré, le foudre apporte une légère oxygénation qui permet de fondre le vin.
  • Fût de chêne : selon leur âge, les fûts ou barriques vont apporter des notes de boisés, de torréfaction et de vanille. Plus les barriques seront vieilles, moins elles apporteront d’arômes. Mais, elles permettront toujours d’équilibrer le vin.

L’évolution des mentalités et des techniques ont permis d’obtenir un gain qualitatif pour les pinots noirs. Il n’est pas rare aujourd’hui de ne pas pouvoir distinguer un pinot noir 1er cru ou un grand cru bourguignon des pinots noirs alsaciens de grandes maisons.

Les pinots noirs d’Alsace se retrouvent ainsi fréquemment sur les grandes tables étoilées de la région. Même si leur notoriété est encore grandissante, la qualité est déjà au rendez-vous !

Quelques terroirs ont même été choisis pour ajouter le pinot noir sur la liste des cépages autorisés en grand cru, et ainsi, acquérir des lettres de noblesses supplémentaires.

 

Bonne dégustation !